28 septembre 2018

Respect du droit en question

Le respect du droit en question : quelques arrêts récents dans le domaine de la santé

Le respect du droit constitue un prérequis indispensable à l’activité de l’Etat et de son administration. Il est à la base de la confiance que les citoyens placent dans les institutions. Il inclut notamment les principes de la légalité, de l’interdiction de l’arbitraire et de l’égalité de traitement.

Voici un petit florilège vaudois de quelques décisions de justice récentes rendues à l’encontre du DSAS :

Patients extra-cantonaux

Un arrêt du Tribunal Fédéral (TF) du 27 janvier 2017 a condamné le DSAS en raison de son interprétation de la LAMal relative au libre choix de l’hôpital par des patients vaudois. Le DSAS prétendait – à tort – que les quotas de patients prévus sur la liste hospitalière genevoise s’appliquaient également aux patients vaudois qui exerçaient leur libre-choix de l’hôpital. Le Canton refusait par conséquent la prise en charge de sa part de financement de 55 %. Le TF a estimé qu’en l’absence d’une planification commune des deux cantons, cette manière de voir était erronée. L’histoire ne s’arrête toutefois pas là. En effet, malgré cet arrêt, le canton continue de refuser de prendre en charge les cas (dont les plus anciens remontent à 2012). Le Conseil d’Etat explique dans sa réponse à l’interpellation de Thierry Dubois «Le patient vaudois est-il un patient de 2ème zone ? Qu’en est-il de la contribution du canton de Vaud à la part cantonale (49a LAMal) pour des séjours de ses ressortissants dans les hôpitaux répertoriés situés hors de son territoire (en particulier Genève)» que des contrôles sont encore nécessaires pour s’assurer du bien-fondé des factures¹. A l’heure actuelle, et au vu de la persistance du refus du Canton, de nouvelles procédures ont été initiées devant les tribunaux vaudois.

Règlement sur la rémunération des médecins-cadres

Le 26 octobre 2017, la Cour constitutionnelle a annulé dans son intégralité le très controversé Règlement sur l’organisation médicale des hôpitaux et sur la rémunération de leurs médecins-cadres faute de base légale suffisante ! Ce texte avait fait l’objet de multiples recours impliquant notamment la FHV, la SVM et Vaud Cliniques.

Clause du besoin – Autorisation de pratique d’une rhumatologue

Le 18 mai 2018, le Tribunal Administratif Fédéral (TFA) a mis en lumière que les décisions concernant les demandes d’autorisation de pratiquer à charge de l’assurance obligatoire des soins pour les médecins spécialistes, rendues par le DSAS, étaient potentiellement basées sur des données incomplètes qui ne tenaient pas compte du taux d’activité des spécialistes concernés au regard des besoins en soins de la population. Le canton a admis ne pas disposer d’informations fiables et documentées sur ce sujet. Le TFA a constaté que le canton de Vaud avait procédé à une instruction incomplète des faits en matière d’évaluation de la couverture sanitaire du canton et du district de Lausanne en lien avec le taux d’activité des personnes dans le domaine de la rhumatologie. Le TFA a finalement intimé le DSAS de compléter son instruction liée à l’évaluation de la couverture sanitaire en rhumatologie dans le district de Lausanne et dans le canton de Vaud, par rapport notamment au taux d’activité des personnes dans le domaine de spécialité concerné.

Equipements médicotechniques lourds

Le 13 juin 2018, la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal a jugé qu’une décision du Département, qui empêchait un établissement privé de s’équiper d’un lithotripteur, était contraire au droit. La Cour a pris d’emblée la décision d’autoriser l’hôpital à s’équiper sans que le Département n’ait à nouveau à se prononcer.

Comme le montrent ces quelques décisions, la tentation peut être grande pour l’administration de placer la réalisation de ses objectifs au-dessus du respect des principes évoqués en préambule. L’autorité judiciaire devient alors le dernier rempart pour empêcher certaines dérives autoritaires et liberticides. On est toutefois en droit d’attendre d’un Etat de droit qu’il montre l’exemple et respecte, sans qu’il ne soit nécessaire de recourir à l’autorité des tribunaux, les limites qui lui sont fixées par le législateur.

¹ 18_INT_148 (29.08.2018).

PolitiqueSanté, n°2, Automne 2018